Maison Franco-japonaise: 日仏会館 Institut français de recherche sur le Japon à la Maison franco-japonaise (Umifre 19, MEAE-CNRS)

Langue:JA / FR


Présentation

Nicolas MOLLARD

Profil : Chercheur à la Maison Franco-Japonaise (UMIFRE 19, MAEDI-CNRS)
Chercheur (gaikokujin kenkyûin) à l'Université de Tokyo (Dépt. de littérature japonaise)
Chercheur associé au CEJ (INALCO/Paris)

Contact :
Maison Franco-Japonaise, bureau français
3-9-25 Ebisu, Shibuya-ku, Tokyo
150-0031 Japon

nicolas.mollard [à ajouter @mfj.gr.jp]

Thèmes de recherche :
Histoire littéraire et intellectuelle du Japon (XVIIIe-XXe s.)
Émergence de la notion moderne d’auteur
Marges géographiques et circulation des savoirs
Traduction de la pensée critique du Japon moderne

Projets de recherche :
1. Émergence de la notion moderne d'auteur
En Occident, l’auteur connaît une progressive désacralisation au sein des avant-gardes modernes au point d’être donné pour « mort » à la fin des années 1960. Or depuis sa liquidation, et peut-être en réaction à l’étiolement de son autorité rassurante, il n’a jamais fait autant couler d’encre. Toutes les analyses s’entendent à déceler dès le XVIe siècle les prémisses d’un tournant épistémologique majeur qui achèvera de fixer les notions modernes de littérature et d’écrivain autour de la période 1750-1850.
Au Japon, dans les années 1980, une partie de la critique amorça un « tournant linguistique » contre l’establishment académique qui voyait dans le créateur de l’œuvre l’autorité finale dépositaire de sa signification. Portée par les approches occidentales contemporaines (l’essai de Barthes fut traduit en 1979), elle libéra le texte de l’emprise de ses auteurs, mais sans jamais questionner l’origine historique du système interprétatif dominant qui avait fait de l’auteur sa clé de voûte. L’émergence d’un régime moderne d’auctorialité n’a suscité à ce jour que peu de réflexions théoriques et encore moins de mises en perspective historiques. Cette histoire reste encore à écrire, et c’est précisément l’objet de cette recherche.
 

2. Marges géographiques et circulation des savoirs
En Asie orientale, sur le temps long de la modernisation (XVIIe-XIXe siècles) coexistent deux logiques de territorialisation : le système du monde sinisé, qui repose sur un centre « civilisé » et des relations tributaires avec des marges « barbares », et le système westphalien, qui suppose un découpage net des limites étatiques. Le glissement de l’un vers l’autre ne se fait pas forcément en douceur ni de manière homogène. Il traduit globalement la perte de prestige de la civilisation chinoise en Asie orientale au profit des puissances occidentales. Au Japon, la désagrégation du modèle sinocentrique nourrit, en retour, la conscience nationale d’un pays qui, depuis le tournant du XVIIe siècle, avait achevé son unification politique, économique et culturelle.
À mesure qu’un intérêt accru pour l’altérité se développe, qu’elle soit intérieure (découverte de la ruralité) ou extérieure (exotisme des marges, des pays limitrophes ou lointains), cartographes, ethnographes, botanistes, amateurs d’art ou de curiosités, pèlerins, poètes ou exilés des confins, de nombreux lettrés quittent leur foyer pour explorer l’ailleurs et l’autrui. Sur ordre de leur seigneur ou par intérêt personnel, ils mesurent, décrivent ou cataloguent le territoire, recueillent et classent objets, idiomes ou pratiques, laissant une production abondante sous la forme de peintures, de croquis, de carnets de notes, de récits de voyage, de monographies encyclopédiques, qui semble être à la fois la matrice de pratiques scientifiques à venir et une source documentaire inépuisable pour les sciences humaines modernes.
L’objectif de cette recherche est de définir comment, où et par qui sont façonnées les connaissances sur les marges territoriales, comment elles circulent entre l’étranger, la périphérie et le centre, et comment elles se diffusent plus largement dans la société à travers la culture populaire.


3. Traduire la pensée critique dans le Japon moderne
Depuis quelques années, la japonologie francophone a fait le constat d’un certain déséquilibre dans le domaine de la traduction des sciences humaines et sociales. Le bilan dressé par exemple lors de la journée du colloque « Traductions France / Japon » tenu à la Maison franco-japonaise le 20 avril 2014 était sans appel : si le volume des traductions littéraires du japonais vers le français est un secteur très vigoureux (grâce aux mangas, le japonais est la deuxième langue étrangère traduite en français après l’anglais), le retard dans les sciences humaines et sociales est tout aussi surprenant (il est encore rare aujourd’hui de pouvoir lire en français les travaux de penseurs ou d’universitaires japonais).
Prenant toute la mesure de ce décalage, plusieurs initiatives ont été lancées par les acteurs de l’édition. Les éditions du CNRS ont publiés plusieurs titres depuis 2008 dans la collection Réseau Asie ; la collection Japon initiée aux Belles Lettres en 2005 comprend une série « non-fiction » ; un projet similaire « Penser au Japon » soutenu par Corinne Quentin devrait prochainement voir le jour aux éditions Picquier.
Le Groupe de Genève est né en 2011 à partir du même constat. Il s’est donné pour but de présenter au public francophone les regards critiques des Japonais sur leur propre société. Il rassemble une dizaine de chercheurs et doctorants associés à l’Université de Genève sous la direction de Pierre-François Souyri.
Un premier volume rassemble les textes de penseurs qui critiquèrent en leur temps la dérive impérialiste et colonialiste du Japon moderne : Pierre-François Souyri (dir.), Japon colonial 1880-1930. Les voix de la dissension, Les Belles Lettres, 2014. 
Un second recueil de traductions de quatre grands intellectuels des années 1950 (Katō Shūichi, Tsurumi Shunsuke, Hashikawa Bunsō et Takeuchi Yoshimi) devrait paraître prochainement : Nicolas Mollard (dir.), La trajectoire du Japon moderne. Regards critiques des années 1950.

Publications et communications :

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